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Presse

La loi du 28 novembre 2021 : vers une meilleure protection des fournisseurs dans le secteur agro-alimentaire

La loi du 28 novembre 2021 transposant la directive (UE) 2019/633 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire a été publiée au Moniteur du 15 décembre. Elle est entrée en vigueur le 25 décembre 2021.

Cette loi s’applique aux relations, au sein de la chaîne d’approvisionnement des produits agricoles et alimentaires, entre d’une part les acheteurs et d’autre part les fournisseurs dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 350 000 000 € (le plafond ne s’applique pas aux coopératives agricoles).

Par produits agricoles et alimentaires la loi vise « les produits énumérés à l’annexe I du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, ainsi que les produits ne figurant pas dans ladite annexe, mais qui sont transformés en vue d’être utilisés dans l’alimentation en recourant à des produits énumérés dans ladite annexe ».

Le but de la loi est de protéger les petits acteurs de la chaîne d’approvisionnement et s’applique aux ventes pour lesquelles soit le fournisseur, soit l’acheteur, ou les deux, sont établis en Belgique

Les enseignes de la grande distribution, les centrales d’achat, … sont susceptibles d’être concernées par cette nouvelle loi.

La loi du 28 novembre 2021 complète le Titre 4, Chapitre 2 (Pratiques du marché déloyales entre entreprises) du Livre VI du Code de droit économique par une section 4 consacrée aux pratiques du marché déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire.

Sur le modèle des clauses abusives dans le secteur B2B, la loi prévoit d’une part une liste de 9 pratiques « noires » qui sont considérées comme déloyales et interdites et d’autre part une liste de 6 pratiques « grises » qui sont présumées déloyales à moins, dit la loi, qu’elles n’aient été préalablement convenues en termes clairs et dépourvus d’ambiguïté dans l’accord de fourniture ou dans tout accord ultérieur entre le fournisseur et l’acheteur.

Citons parmi les pratiques « noires » :

  • le fait d’imposer aux fournisseurs des paiements sans lien avec la vente de produits agricoles et alimentaires,
  • le fait de mettre à charge du fournisseur la détérioration ou la perte de produits qui ne sont pas imputable à une négligence ou une faute du fournisseur
  • l’utilisation ou la divulgation illicite par l’acheteur des secrets d’affaires du fournisseur.

Parmi les pratiques « grises » on trouve par exemple :

  • le renvoi des produits invendus au fournisseur sans payer pour ces invendus,
  • la demande faite au fournisseur de payer pour la commercialisation des produits,
  • la demande faite au fournisseur de supporter tout ou partie des coûts liés aux remises dans le cadre d’actions promotionnelles à l’initiative de l’acheteur sauf si, avant une action de promotion, l’acheteur précise sa durée et la quantité de produits qu’il prévoit de commander à prix réduit. L’acheteur doit aussi fournir préalablement à chaque action promotionnelle une estimation écrite du montant à payer par le fournisseur et/ou des éléments sur lesquels cette estimation est basée et le fournisseur doit donner son accord exprès sur ces coûts. A défaut, le fournisseur n’est pas tenu de supporter ces coûts.

Au niveau des sanctions, la loi frappe de nullité les clauses contractuelles qui ont pour objet des pratiques déloyales mais le contrat reste contraignant pour autant qu’il puisse subsister sans la/les clause(s) contractuelle(s) interdite(s).

Des plaintes peuvent être déposées auprès des agents de l’Inspection économique du SPF Économie. En cas de nécessité, l’identité du plaignant pourra rester confidentielle.

Les infractions à la loi peuvent donner lieu à des avertissements ou des amendes administratives qui peuvent s’accompagner d’une mesure publicité nominative.

Comme indiqué ci-dessus, la loi est entrée en vigueur le 25 décembre 2021.

Si la loi sur les clauses abusives dans le secteur B2B prévoyait qu’elle ne s’appliquait qu’aux contrats conclus après son entrée en vigueur, la présente loi s’applique aux contrats en cours à la date de la publication (soit le 15 décembre 2021), les parties disposant toutefois d’un délai de 12 moins à dater de cette publication pour adapter les contrats.

Marc GERON
Avocat au Barreau de Liège-Huy